Où placer le curseur de l'addiction quand on est accro au sexe virtuel ?

Les nouvelles technologies ont fait grandir les opportunités de pratiquer le sexe virtuel : les sites internet pornographiques ou bien les applications de rencontres avec des échanges coquins puis les jeux de rôles en ligne à caractères sexuels... Aussi cette période de pandémie (entre isolement et peur d'être contaminé) rend certains comportements à long terme préoccupants.

Etre accro au sexe virtuel : Où placer le curseur de l'addiction ?

(d'après Addictions Sexuelles : Approche clinique et Thérapeutique de Marthylle LAGADEC- Colloque Européen et International et études de cas et analyse comportementale de Matthieu Lamarque )

Il y a peut-être autant de pratiquants que de raisons à s’adonner au sexe virtuel. Et les raisons abondent.

Certains diront que c'est pour échapper à la solitude ou à la monotonie du quotidien, d'autres diront que c'est pour partager ses fantasmes sans avoir à les concrétiser, ou bien pour se prouver et prouver à l’autre que l’on peut encore séduire, puis finalement pour avoir une dose quotidienne d’excitation et de stimulation sexuelle.

Dès 1996, l’American Psychological Association a constaté qu'il pouvait y avoir un risque de dépendance de certaines personnes à Internet, tout comme d’autres personnes peuvent être dépendantes à l’alcool, aux drogues ou au jeu. 

Il y a donc la dépendance au sexe virtuel dans l'addiction à internet. Cette dépendance n’est qu’une facette , mais elle a les mêmes conséquences à long terme de toutes addictions : problèmes conjugaux et professionnels, isolement, désocialisation, comportements inappropriés et disproportionnés… La dépendance au sexe virtuel est prise très au sérieux par les professionnels de la santé.

Le docteur Kimberly Young, une spécialiste mondiale du cybersexe compulsif, , a établi une liste de questions pour déterminer si un patient est accro au sexe virtuel ou s’il risque de le devenir :

- Passez-vous beaucoup de temps sur Internet, par chat ou par échanges de messages privés, à la recherche d’opportunités de cybersexe ?

- Êtes-vous soucieux, sur Internet, de trouver des partenaires de sexe virtuel ?

- Utilisez-vous souvent une fausse identité, un pseudo, un âge faux pour satisfaire des fantasmes virtuels ?

- Êtes-vous impatient d’aller sur Internet pour y trouver de l’excitation et de la gratification sexuelles ?

- Cachez-vous à votre entourage vos navigations sur Internet dans le but de pratiquer le sexe virtuel ?

- Êtes-vous honteux ou vous sentez-vous coupable de pratiquer le sexe virtuel ?

- Vous masturbez-vous lorsque vous chattez avec un partenaire de sexe virtuel et combien de fois par semaine, par jour ?

- Préférez-vous le sexe virtuel, avec des partenaires à distance ou inconnus, au sexe réel avec votre partenaire habituel ?

Si le patient répond par l’affirmative à une ou plusieurs de ces questions, le risque d’être accro au sexe virtuel est effectivement possible.

L'excitation et l’amusement des premières fois peut en mener à des conduites dangereuses aux conséquences graves. Naviguer sur des sites érotiques ou des applications de rencontres de temps à autre peut mettre du piment dans son quotidien et/ou dans son couple, mais si la personne en fait une consommation excessive (seule ou en couple), il faut tirer la sonnette d’alarme.  Cela peut développer une forme de mythomanie car le patient se perd entre le moi réel et le moi virtuel. Il pense contrôler et gérer son image alors que non. Il pourrait même arriver à se convaincre que certaines choses virtuelles existent...

Comment se désintoxiquer du sexe virtuel ?

Contrairement à la cigarette, à l'alcool ou à la drogue, être accro au sexe virtuel n’implique pas une dépendance physique. De même que l’addiction au jeu, il sagit d’une dépendance psychologique. Les thérapies cognitivo-comportementales démontrent une bonne efficacité pour aider les personnes accros au sexe virtuel.

Notez aussi que les méthodes mises en place pour les dépendances physiques s’avèrent elles aussi valables pour lutter contre l’addiction au sexe virtuel.

Ainsi, l’abstinence totale au sexe virtuel est recommandée ! Il est conseillé de détruire tous les fichiers, liens, emails, favoris, logiciels, applications permettant de s’adonner au sexe virtuel. Vous devez installer l’ordinateur dans une pièce commune où il y a du passage et de consulter Internet uniquement lorsqu’il y a une autre personne dans la maison puis de retrouver une vie sociale et sexuelle "réelle" pour ne plus céder à la tentation du sexe virtuel.

Il n’y a hélas, comme pour bien des dépendances, pas de demi-mesures à adopter pour s’en sortir…

Matthieu Lamarque